Les Routes de la Soie: L'histoire du cœur du monde (French Edition) by Peter Frankopan

Les Routes de la Soie: L'histoire du cœur du monde (French Edition) by Peter Frankopan

Auteur:Peter Frankopan [Frankopan, Peter]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Nevicata
Publié: 2017-10-16T22:00:00+00:00


Au cœur du problème, il y avait l’enjeu dont l’Angleterre n’ignorait rien, grâce aux ressources naturelles enfin découvertes en Iran : selon toute vraisemblance, la Mésopotamie en était dotée. De fait, une concession pour son pétrole avait été approuvée (quoique pas formellement ratifiée) le jour même de l’assassinat de François-Ferdinand, le 28 juin 1914. Elle avait été octroyée à un consortium conduit par la Turkish Petroleum Company, dont l’Anglo-Persian était l’actionnaire majoritaire, et la Royal Dutch/Shell et la Deutsche Bank des actionnaires minoritaires, outre le pourcentage de Calouste Gulbenkian, intermédiaire hors pair qui avait facilité l’accord.58 Quels que fussent les promesses ou les engagements prodigués aux peuples et aux nations du Moyen-Orient, la forme et l’avenir de toute la région, en réalité, étaient imaginés en coulisses par des fonctionnaires, des politiciens et des affairistes qui n’avaient qu’un objectif : prendre le contrôle du pétrole et des oléoducs qui l’achemineraient dans les ports où il serait chargé sur les pétroliers.

Les Allemands comprenaient bien ce qui se tramait. Dans un mémorandum qui parvint en mains anglaises, ils affirmaient que l’Angleterre avait deux visées stratégiques prioritaires. La première était de conserver la mainmise sur le canal de Suez à cause de sa valeur stratégique et commerciale unique ; la deuxième était de s’emparer des champs de pétrole de Perse et du Moyen-Orient.59 C’était fort bien vu. L’empire transcontinental de l’Angleterre s’étalait sur près d’un quart de la planète. Malgré sa richesse climatique, en écosystèmes et en ressources, il lui manquait évidemment un atout : le pétrole.

Faute de réserves significatives dans aucun de ses territoires, la guerre lui offrait la possibilité d’y remédier. « La seule grosse source potentielle, écrit Sir Maurice Hankey, l’érudit secrétaire général du Cabinet de guerre, « c’est la source persane et mésopotamienne. » En conséquence, établir « le contrôle de ces sources de pétrole devient un but de guerre impératif ».60 Il n’y avait rien à gagner dans la région d’un point de vue militaire, affirme Hankey dans une lettre du même jour au Premier ministre, David Lloyd George ; mais l’Angleterre devait agir avec détermination si elle entendait « s’assurer des précieux puits de pétrole » de Mésopotamie.61

Rares étaient ceux qu’il fallait encore convaincre. Avant la fin de la guerre, le ministre anglais des Affaires étrangères décrivait sans ambiguïté l’idée qu’il se faisait de l’avenir. Assurément, des questions se posaient s’agissant du démembrement des empires ennemis, mais « peu m’importe, déclare-t-il à de hauts fonctionnaires, sous quel système nous garderons le pétrole, si c’est par un bail perpétuel ou autre, mais il est bien évident qu’il est de la plus haute importance que nous disposions de ce pétrole ».62

Semblable détermination – et les inquiétudes la motivant – étaient assurément justifiées. Au début de 1915, l’Amirauté consommait 80 000 tonnes de pétrole par mois. Deux ans plus tard, par suite du plus grand nombre de bateaux en opération et de la prolifération des moteurs au gasoil, la consommation mensuelle s’élevait à 190 000 tonnes. Les besoins de l’armée de



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